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lundi 30 juin 2008

Bilan du mois

Après un mois à courir les événements tous les weekends sans prendre le temps d'écrire, voici une brève récapitulation de la projection visuelle et des prestations musicales qui ont marqué mes derniers 30 jours.

The Raconteurs
Tout d'abord, le spectacle tant attendu non seulement de l'été, mais de l'année : The Raconteurs. Leur dernier passage à Montréal à l'automne 2006 avait été mémorable et je ne croyais pas que cette deuxième fois pouvais l'être davantage. Baptisé comme étant le meilleur groupe live par nul autre que Bob Dylan, titre secondé par les magazines musicaux spécialisés, Jack White et ses quatre acolytes ont fait non seulement vibrer nos tympans, mais notre épiderme. Notons particulièrement la performance de Blue Veins, pièce que le groupe a joué sur plus d'une dizaine de minutes avec une introduction instrumentale qui renvoyait à la signature musicale de Pink Floyd. Cette prestation a été sans aucun doute la meilleure de tout ce que j'ai pu voir jusqu'à aujourd'hui. Wake Up d'Arcade Fire passe désormais au second rang.

Égal
à lui-même, Jack White, munie de sa guitare, était toujours aussi glorieux. Sa guitare acoustique, laquelle expulse un son à la fois perçant et pur, rendait à merveille la tonalité folk dont The Raconteurs sait si bien manipuler.

Karkwatson
Le deuxième weekend fut marqué par le spectacle inédit de Karkwatson. Concept initié à la base par Jim Corcoran, il était magnifique de voir les cinq musiciens de Karkwa, Patrick Watson ainsi que ses trois complices alterner leurs pièces respectives en créant une atmosphère tout à fait mélodieuse. Les jeux de lumières accentuaient davantage l'univers planant provoqué par les chansons. Le compteur, pièce tirée du nouvel album de Karkwa sur laquelle Patrick Watson apporte sa collaboration, était d'un rythme renversant.

Ce qui
fut le plus touchant était de voir ces deux groupes se lancer la balle, dans les deux langues (anglais et français), une semaine avant la St-Jean-Baptiste. Pour quelques heures seulement, sous la chaleur écrasante du National, on pouvait assister à un spectacle qui réunissait deux richesses musicales québécoises où la langue n'était plus un conlfit politique, mais bien un art culturel.

Enfin, la chimie de Karkwatson fut
à son apogée lors de la prestation accoustique de Man Under the Sea alors que Patrick Watson et Louis-Jean Cormier se sont placés sur un petit monticule au milieu du public, que les sept autres musiciens étaient sur la scène et que la foule accompagnait a cappella Watson et Cormier. Une seule déception : l'absence de The Great Escape dans le répertoire de la soirée.

Vier Minuten
Oeuvre acclamée dans plusieurs festivals de films européens, Vier Minuten de Chris Kraus est un long-métrage émouvant que j'attendais depuis le printemps dernier. L'histoire de cette jeune criminelle allemande au talent de pianiste incomparable est à la fois crue et touchante. Le parallèle entre la réalité persécutrice de Jenny (Hannah Herzsprung) et l'univers gracieux de la musique classique crée une poésie dans le schéma narratif du film. La dynamique entre la pianiste et son professeur (Monica Bleibtreu), un échange constant de haine et d'amour, relève d'une tension sexuelle refoulée. Les deux performances s'avèrent visiblement mémorables, notamment dans la scène finale alors que la jeune pianiste donne une performance devant public; une scène renversante où la protagoniste s'emporte dans sa musique jusqu'à exploiter littéralement le mécanisme de son instrument.

mardi 10 juin 2008

Conte de fée à New York

Comme la plupart des (trop) enthousiastes adeptes de la télésérie, c'est avec une hâte incontrôlable que je me suis rendue à la projection du très attendu Sex and the City. Après avoir visionné quelques teasers et les deux bande-annonces, je me suis trouvée décue par ce long-métrage à la sauce hollywoodienne dont le scénario ne reflète pas la structure narrative à la fois crue et sarcastique de la télésérie.

La fébrilité se faisait déjà sentir à l'achat des billets. Au moment où les lumières se sont éteintes dans la salle, les admiratrices (dont moi-même) ont frolé les applaudissements tellement elles étaient excitées. Pour ma part, ce fut de courte durée, le temps de voir les premières scènes alors que la fameuse narration du personnage de Sarah Jessica Parker, Carrie, dresse un bref portrait de ses trois acolytes. Il s'agit d'une introduction complètement inutile : nous avons suivi les torrides aventures de ces quatre mousquetaires pendant plus de six ans!

De ce fait, Sex and the City n'a pas
été réalisé pour les amateurs de la télésérie, mais bien pour le grand public. Plusieurs scènes sont non seulement issues d'un kitsch ennuyant, mais elles sont longuement prévisibles. Aussi, même si les quatre dames ont toujours porté d'extravagantes tenues vestimentaires, une réfence en ce qui concerne l'avant-garde de la mode, elles se trouvent complètement démesurées dans le film. Enfin, Sex and the City comporte des longueurs. L'avènement d'un nouveau personnage de Louise (Jennifer Hudson), l'assistante de Carrie, n'était pas nécessaire. Pourquoi cette attention particulière sur un nouveau protagoniste alors que le scénario met de côté le coloré personnage de Stanford (Willie Garson), très bon ami de Carrie et personnage très présent dans la série?

Malgr
é tout, le personnage de Samantha (Kim Cattrall) réussit toujours à nous divertir. Ses expressions manifestement crues ainsi que sa nonchalance nous surprennent à tous coups. Que de tristesse toutefois de ne pas la voir aussi « out there » que dans les émissions. Cette retenue est définitivement le résultat de la stabilité qu'incite la quarantaine. C'est probablement pour cette raison qu'on y parle moins de sexe et plus du bonheur trouvé auprès du prince charmant. Heureusement, même si les quatres protagonistes évoluent vers la stabilité, elles sont loin d'être ennuyantes.

Sex and the City va certainement plaire aux gens qui ne connaissent pas la t
élésérie. Malgré le fait que je n'ai pu retrouver le même enthousiasme que celui provoqué par les émission, revoir le fameux quatuor Carrie, Samantha, Miranda (Cynthia Nixon) et Charlotte (Kristin Davis) s'est avéré une expérience tout à fait Fabulous!

dimanche 2 mars 2008

Danser avec la solitude

Dans le cadre de la 26e édition des Rendez-vous du cinéma québécois, je me suis présentée à la projection du magnifique premier long métrage de Stéphane Lafleur, Continental, un film sans fusil.

À la suite de la disparition mystérieuse du mari de Lucette (Marie-Ginette Guay), quatre personnages se trouvent dans un quotidien submergé par le désespoir, la solitude et l’attente d’un jour meilleur qui saura placer sur leur chemin une âme sœur. Alors que l’absence de son mari pousse Lucette dans un état de folie, Louis (Réal Bossé) tente malencontreusement de réussir dans son nouvel emploi et de maintenir une relation de couple saine, Chantal (Fanny Mallette) survit au célibat en se laissant des messages imaginaires sur sa boîte vocale et Marcel (Gilbert Sicotte) échappe aux effets nocifs de sa faillite personnelle en s’appropriant les biens des autres. C’est au moment où la tristesse de chacun se croisera que la faible lueur de bonheur tant recherchée se manifestera.


Continental
est sans aucun doute le film d’auteur québécois le plus révélateur de 2007 (je me retiens pour ne pas dire 2008, puisque j’anticipe Incendies de Denis Villeneuve). Dès les premières séquences du long métrage, chaque personnage est peint dans son environnement respectif, univers qui s’avère révélateur quant au caractère de chacun. La direction photo de Sara Mishara est d’une sobriété purement magnifique. Les plans sont très léchés, épurés : le cadre s’installe, reste fixe et attend simplement que les personnages prennent place. L’éclairage accueille ces derniers de sorte à accentuer l’état de solitude dans laquelle ils baignent. Aussi, les couleurs fades aux teintes vertes et beiges évoquent bien le malaise des protagonistes.


Fanny Mallette est bouleversante, voire troublante. Bien qu’elle adopte un rôle similaire à ce qu’elle a fait à maintes reprises auparavant, elle assure son personnage dans tout son pathétisme de sorte à ce que sa solitude dérangeante devient sympathique. Pour sa part, Réal Bossé surprend agréablement. Associé souvent à des rôles loufoques, il sait rendre tout le désespoir et l’instabilité de son personnage. Malgré le caractère particulièrement lourd des protagonistes, Marie Brassard vient déstabiliser la noirceur du récit avec son personnage d’une gêne tout à fait hilarante.


Si Continental est avare en dialogues, c’est que ces derniers s’avèrent singulièrement efficaces quand ils sortent de la bouche des personnages. L’étrangeté du titre de ce film se veut une allégorie au caractère solitaire de la danse traditionnelle. La séquence où le personnage de Lucette s’exécute parmi le groupe de danseurs est non seulement révélateur à ce sujet, mais est surtout d’une beauté poétique qui réussit bizarrement à nous bercer.


Tout le monde finit par trouver son compte dans cette comédie noire qui faire rire jaune.

dimanche 9 décembre 2007

L'ère du changement

Dans le cadre de sa 36e édition, le Festival du Nouveau Cinéma (FNC) offrait une de ses programmations les plus riches et les plus diversifiées. L’événement soulignait aussi quelques premières québécoises très attendues, soient le premier long-métrage de Jean Leclerc, Ice cream, Durs à cuire de Guillaume Sylvestre ainsi que L’âge des ténèbres de Denys Arcand.

Malgré les mauvaises critiques depuis sa sortie à Cannes, le dernier film d’Arcand était présenté à guichet fermé. Dans l’assistance, l’excitation était palpable, principalement lorsque Claude Chamberlan, fondateur et directeur de la programmation du FNC, a annoncé la présence de Denys Arcand après la projection. Malheureusement, mon sentiment de satisfaction est venu uniquement au moment où la bande de film a cessé de tourner, suivi par l'entrée du principal invité.


Fonctionnaire provincial, Jean-Marc Leblanc (Marc Labrèche) est lassé de son train de vie. Mal marié, père sans autorité, employé blasé, il tente d’échapper à son quotidien en se glissant dans la peau d’un grand charmeur célèbre, souhaitant que ses aventures le mène vers la quiétude.


L’âge des ténèbres
est sans aucun doute le long-métrage le plus commercial d’Arcand. Il semble que depuis Les invasions barbares, le cinéaste ne se satisfait plus de s’inspirer d'une réalité sociale québécoise sombre, mais plutôt de surligner avec une touche caricaturale le système dans lequel cette dernière baigne.

En effet, le cinéaste fait évoluer ses protagonistes dans des endroits complètement absurdes. Du stade olympique au site de duels médiévaux, présentant des personnages tous aussi illuminés que vides, adoptant un mode de vie déconnecté de la réalité. Cette approche satirique fait grandement penser à la trilogie Elvis Gratton, particulièrement le troisième volet, de Pierre Falardeau.


Avec L’âge des ténèbres, Arcand brise les lois de la dramaturgie cinématographique et ce risque dérange considérablement le spectateur. Certaines scènes, principalement celle de l'épopée médiévale, manifestent des longueurs qui provoquent l’ennui. Aussi, un clin d'œil douteux à Tarantino pour son œuvre Kill Bill tend à déstabiliser de sorte à installer un parallèle démentiel.


La palette d’acteurs est toutefois impressionnante. Sylvie Léonard, fidèle (si ce n'est que redondante) à ses choix de casting, est efficace dans son rôle de femme de carrière frustrée, mal baisée. Pour sa part, Marc Labrèche s’avère juste, mais échoue en ce qui a trait à l’émotivité de son personnage de sorte à manifester un vide
.

Malgré tout, Arcand ne laisse pas tomber (heureusement!) le côté noir de la vie, soit la mort. Cette dernière est toujours présente et le cinéaste l’illustre avec une intensité poignante. Même si elle s’avère plus accessoire dans ce long-métrage, c’est dans les scènes où elle est éloquente, notamment à l’hôpital, que l’on retrouve avec soulagement la signature d’Arca
nd.

Ne vous méprenez pas à croire qu’il s'agit d’un troisième volet à la fameuse « suite » au Déclin de l’empire américain et aux Invasions barbares. Bien que le cinéaste ait un faible pour les époques historiques, L’âge des ténèbres reste simplement familier dans l’inspiration générale du récit
.

Avec L’âge des ténèbres, Arcand montre que même la dépression provoque le fantasme et le rêve. Une chose est sûre, réaliser ces derniers et se faire plaisir ne fait pas toujours le bonheur du public.

dimanche 2 décembre 2007

Besoin d'amour

The Beatles a toujours exercé un pouvoir d’influence considérable dans la musique. Au cours des dernières années, l’œuvre du groupe culte britannique a non seulement inspiré le monde du cirque (LOVE), mais particulièrement le cinéma. Après l’émouvant I am Sam, c’est Across the Universe qui présente une trame narrative entièrement construite à partir des chansons des Beatles, mettant en vedette les personnages célèbres de ces dernières, évoluant dans une atmosphère qui leur sont propre : le romantisme psychédélique.

Jude (Jim Sturgess) quitte Liverpool pour aller retrouver son père aux États-Unis. Il fait ainsi la rencontre de Max (Joe Anderson), un jeune bourgeois rebelle. Accompagnés de la sœur de ce dernier, Lucy (Evan Rachel Wood), les deux jeunes hommes quittent la banlieue pour partir à New York afin de vivre un quotidien libertin, sans limites, propre à la réalité du mouvement hippie des années 60. Alors que le pays est en guerre au Vietnam, Max est appelé à joindre les rangs du peloton. Submergés par l’amour, l’art et le militantisme pour la paix, ses jeunes aveuglés par la passion se trouveront soudainement atteints par la rupture.


La comédie musicale de Julie Taymor transporte agréablement le spectateur dans un univers rêveur, là où limite est synonyme de réalité. La direction photo ainsi que la direction artistique des scènes chorégraphiques sont dignes d’un trip d’acide coloré mais surtout, transcendant. Chaque chanson est exploitée dans toute sa beauté lyrique dévoilant peu à peu la vulnérabilité des personnages. La performance de Strawberry fields forever, criante de désespoir, est intensément renversante alors que Jude se trouve à la fois blessé et soudainement envahi par la haine.


C’est toutefois I am the Walrus, interprété par un Bono illuminé, qui signe un moment culte dans le psychédélisme narratif. La séquence de nudité sous l’eau marque également un moment de pur romantisme, voire virginal.

Même si quelques scènes peuvent sembler discordantes les unes par rapport aux autres, ces dernières révèlent tout le caractère expérimental et poétique du film. Malgré tout, certaines longueurs s’imposent. Bien que les images réussissent à séduire le public, le montage faut en ce qui a trait à la concision.

Les acteurs, parfois justes, parfois maladroits, font preuve d’une fragilité charismatique, comme le font souvent ces jeunes artistes « découverte » sortis directement de l’underground des arts de la scène.

Across the Universe
s’avère inévitablement la meilleure comédie musicale depuis Moulin Rouge. Le long-métrage nous plonge dans un univers où l’on tombe amoureux de la vie, amoureux de la musique; une réalité qui prend fin là où l’on ferme les yeux.

Reste
à trouver notre Jude ou notre Lucy, puisque « love is all we need ».

lundi 8 octobre 2007

Il était encore une fois…

Depuis 2002, notamment avec la sortie de Québec-Montréal, les artisans de l’industrie du film éprouvent une gourmandise pour les scénarios construits autour de protagonistes masculins lâches et insouciants, constamment en quête d’une concrétisation de leurs fantasmes. Le premier long-métrage de Patrick Huard, Les 3 p’tits cochons, ne fait pas exception à la formule. Traitant particulièrement de l’infidélité conjugale, le réalisateur dresse le portrait de trois frères piégés par leur vulnérabilité. Un récit au cours duquel la référence métaphorique d’un conte pour enfants se révèle efficacement subtile.

Victime d’un traumatisme émotif provoquant un coma, une mère (France Castel) réunit ses trois fils, Mathieu (Claude Legault), Christian (Guillaume Lemay-Thivierge) et Rémi (Paul Doucet), au pied de son chevet. Ces derniers, angoissés par leurs relations de couple sexuellement perturbées, tentent, chacun à leur façon, de régler le supplice conjugal qui les habite, en discutant du bien-être que leur procure l’infidélité. Se prétendant presque innocents dans leurs actes et propos, les trois frères vivront un plaisir éphémère qui se tournera rapidement contre eux, et ce, sans exception.


Dirigée par une narration qui distrait, la comédie dramatique expose les trois protagonistes évoluant dans des milieux de vie distinctifs, lesquels sont présentés gratuitement au début du film. Malgré une cinématographie qui ne se démarque pas, Les 3 p’tits cochons réussit à intégrer un dynamisme avec son rythme narratif décousu, à partir duquel certaines scènes sont montées de manière fluide, en ne respectant pas l’ordre chronologique des événements.


Utilisant un rapport abusif de sous-exposition/surexposition de la lumière afin de marquer le sentiment de tension relatif à l’épanouissement du personnage de Mathieu, Bernard Couture, directeur photo, exploite maladroitement son intention. Il réussit cependant à créer une ambiance froide avec des couleurs verdâtres qui expriment bien l’atmosphère du mensonge qui règne dans le film.


C’est toutefois la performance saisissante des comédiens qui fait toute la richesse de ce long-métrage. Claude Legault, fidèle à lui-même, fait preuve d’une vulnérabilité séduisante. La chimie entre lui et Guillaume Lemay-Thivierge, lequel joue avec une naïveté spontanément comique, se révèle à la fois cocasse et intrigante. Le couple formé par Mathieu et Geneviève (Isabel Richer), émotionnellement fragile, est si bien exploité qu’il échappe, malgré la morale traitée à maintes reprises, au discours vide de sens pour faire place à une sensibilité touchante.


Le fil conducteur du récit reste avant tout l’analogie au conte pour enfants. Cette dernière, relevée avec brio, soulève des références aussi directes que subtiles. Du statut social des trois frères au fait que les deux « sans-abris » se réfugient sous le toit de celui qui semble plus solide, rien n’est oublié dans le scénario de Pierre Lamothe et Claude Lalonde. Même la lecture du conte en soi ainsi qu’un court extrait de la chanson de Dan Bigras exécutés par le personnage de Mathieu sont présents.

Après le portrait du père absent ainsi que celui de l’homme trentenaire ayant peur de l’engagement, le cinéma québécois se lance une fois de plus dans l’abus d’un courant social de notre culture. Il faut croire que la stabilité représente la zone de confort souhaitée par la majorité des gens, sans toutefois épargner l’option de sauter la clôture…

vendredi 30 mars 2007

Rêver n’est pas qu’un jeu d’enfant

Une fois de plus, Michel Gondry explore l’univers de l’inconscient avec son dernier long-métrage, The science of sleep. Après s’être penché sur la psychose du rêve dans Eternal sunshine of the spotless mind, voilà que le cinéaste replonge son public dans un voyage onirique avec ce film aux images si espiègles.

À la suite du décès de son père, Stéphane (Gael García Bernal), un artiste simple d’esprit, revient habiter temporairement sous le toit maternel. Il renoue alors avec le petit garçon qu’il était et tous les rêves qui l’accompagnaient. Stéphane fait également connaissance avec sa nouvelle voisine, Stéphanie (Charlotte Gainsbourg), une jeune fille brisée par une réalité morne et malveillante, à qui il tentera désespérément de faire retrouver le cœur d’enfant.

Gondry a véritablement le don de reproduire le caractère abstrait et surréaliste des pensées et des rêves de ses personnages. Avec The science of sleep, il exploite le thème dans son absurdité la plus simple. Les décors cartonnés, les effets visuels rudimentaires ainsi que la psychologie quelque peu arriérée des protagonistes relèvent d’un vrai spectacle de marionnettes, voire d’un flip book.

Ce qui fait de Michel Gondry un réalisateur admirable est sa façon de construire les histoires. Le montage est basé sur un procédé narratif d’une brillante précision. Il réussit à maintenir une continuité radieusement fluide, naviguant du rêve
à la réalité. De plus, la trame sonore épouse harmonieusement le rythme avec ses mélodies sobres et sereines.

Fidèle à lui-même, Gael García Bernal interprète le personnage de Stéphane avec une justesse quasi-loufoque. Son jeu est si naïf que nous avons l’impression de suivre les aventures d’un jeune garçon de 11 ans. Cependant, Charlotte Gainsbourg est loin de surprendre. Elle ne semble pas avoir foi en son rôle, ce qui la mène à forcer sévèrement la note pour ainsi briser la magie féerique devant régner entre les deux tourtereaux du récit.

The science of sleep est un film qui demande incontestablement un deuxième degré de lecture. Il s’agit non seulement de plonger dans l’imaginaire enfantin, mais de saisir la critique sociale snob et égoïste qu’évoque Gondry. Même si le long-métrage est faible en ce qui a trait à sa profondeur, il reste efficace dans son discours. À tous les amateurs de bricolage, aux nostalgiques du premier coup de foudre ainsi qu’aux cinéphiles de surréalisme élémentaire.

Sweet dreams!

lundi 12 mars 2007

Un amour mortel excessif

Dans le cadre de la 25e édition des Rendez-vous du cinéma québécois, je me suis présentée à la projection de La Belle Bête, un long-métrage dérangeant de Karim Hussain.

D’après le roman de Marie-Claire Blais, La Belle Bête adapte à l’écran le portrait troublant d’une famille aux penchants incestueux. Une mère, Louise (Carole Laure), en adoration devant la beauté angélique et innocente de son fils Patrice (Marc-André Grondin) rejette sa fille Isabelle-Marie (Caroline Dhavernas), dont elle répugne le physique. Cette dernière jalouse l’intimité que son petit frère partage avec sa mère au point de lui affliger des violences martyres.

La Belle Bête se classe inévitablement dans le cinéma de genre. Une fois de plus, Hussain fait évoluer ses personnages dans un environnement surréaliste et onirique, un univers cependant mal exploité, voire excessif.

Avare en dialogues, le scénario signé Julien Fronfrède (également producteur) Hussain et Blais provoque chez ses acteurs une mise en scène quasi-théâtrale. Les personnages adoptent ainsi un accent français maladroit qui frôle le ridicule.

Non seulement le jeu semble forcé, mais la direction photo produit un climat constamment instable. Le montage n’invoque aucun prolongement entre la luminosité des scènes extérieures et à la fadeur des images intérieures. Cette discontinuité n’améliore en rien le rythme décousu de l’histoire causé par une intemporalité ratée.

L’humour ironique et cynique du film est toutefois divertissant. Notons le personnage totalement exagéré de Lanz (David La Haye). Les scènes d’inceste sont également d’une beauté romantique.

La Belle Bête est une œuvre d’un genre qui se fait rare dans le répertoire cinématographique québécois. Malgré ses intentions, Hussain perd son public avec des images beaucoup trop chargées, un abus révélant une importante lacune en ce qui a trait à la recherche.